Le parc





J'ai grandi dans un quartier de Paris situé à proximité des Buttes-Chaumont. Me croira-t-on si je dis que ce parc avait pour moi, dans mon enfance, la même valeur religieuse et sacrée que, pour un Gaulois, la forêt de chênes; pour les Grecs et les Romains de l'Antiquité la nature sauvage, les autels agrestes ?
Il me semble qu'il devait en être ainsi également pour ma mère et les habitants du quartier qui subissaient forcément comme moi l'influence païenne du lieu, comme si, couronnée du faux Belvédère, cette butte artificielle de verdure avait été une machine émettant des ondes, des vibrations bénéfiques ordonnées pour maintenir notre équilibre. (Enfant de la ville, coupé de tout, la Nature m'est vite apparue comme l'environnement fonctionnel le mieux adapté à l'existence humaine!)
Là se trouvaient réunis quelques-uns des éléments les plus favorables à la méditation, au recueillement : la grandeur, la majesté, comme de ces noirs piliers de cathédrale -troncs des arbres- dont les énormes frondaisons occultaient en été le soleil et faisaient vivre, dans une ombre fraîche et humide des millions d'insectes.

Coda
Je me revois, enfant, au pied d'un de ces piliers gigantesques, levant les yeux vers l'empyrée lointain des feuilles d'où, comme j'eusse aimé le croire, un dieu bienveillant me regardait.




Echo
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Prière