Gare du Nord


Nous ne sommes pas trop jeunes pour assister à la victoire de la durée sur le temps et contempler, dans l'éternité retrouvée, la déesse Bastet (à tête de chatte), foulant d'un pas majestueux le trottoir en face de la gare du Nord, avant de remonter s'asseoir sur le trône qu'elle n'aurait jamais dû quitter, à droite du fronton, et qu'occupe actuellement une ville quelconque -c'est ce qu'ont tenté de vous dire avant moi d'autres poètes en mélangeant anarchiquement des éléments empruntés aux anciennes cultures, non pas tant pour se donner l'air d'en savoir davantage que le commun des hommes que pour communiquer, comme moi à présent, la joie gonflée de plénitude qu'il y a à aimer, à aimer tout, le monde, les siècles, toutes les formes de l'art, et la vérité immortelle !
L'amour, et la fière reconnaissance du besoin sexuel, et replonger dans le fleuve immense qui charrie pêle-mêle toutes les richesses engendrées depuis le commencement des temps par le génie créateur... frontons, colonnes, statues brisées y côtoient les humbles formes d'aujourd'hui : le kiosque à journaux, la bicyclette, tout ce qui nous parle de la femme aimée !
O toi la créature par excellence, celle que Dieu jugea utile de faire après qu'Il eut tout créé, toi la Nécessaire, femme, déesse en robe à fleurs de printemps coloriée de rouge, je te vois, avec ton chic, le chien extraordinaire que tu montres, trottinant du haut de tes talons dans une poussière d'or qui s'élève -ta gloire- et t'avançant vers moi, chargée du monde antique et surréaliste de Chirico, marbres blancs, lunettes noires, et mes bras se tendent tout seul vers toi, mes mains te saisissent, je te presse sur mon coeur.




Créer
[Accueil] [Des chats] [Le cavalier de l'hippocampe] [Carnets]
Lille, Roubaix, Tourcoing