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Le vol des oiseaux Sachez qu'être vivant, respirer, songer tranquillement assis dans un fauteuil en regardant, par la fenêtre, fondre sur soi depuis le haut du ciel un oiseau qui, comme tout-à-coup retenu par un obstacle invisible replie les ailes, semble s'arrêter suspendu dans les airs, puis se re-déploie inexplicablement poursuivant -sauf cet instant imperceptible tenant du miracle- sa course impeccable, confine à l'extase. Que le vol augural des oiseaux migrateurs dans le ciel infini d'automne, lambda majuscule animé par la tension des volontés individuelles en lutte avec la loi, l'instinct vainqueur qui le modèle, lettre prophétique de l'hiver, ne soit pas seulement pour tous un symbole d'harmonie, l'image de la pérennité de la nature, mais aussi comme pour moi apposé visiblement là-haut, irréfutablement, l'empreinte, le poinçon de Dieu ! Ce n'est pas parce que les auspices n'existent plus que le caractère ordonné de la venue d'oiseaux dans un ciel jusque-là vide manque d'apparaître comme un "signe" à des yeux clairvoyants. Justement perçu, c'est-à-dire fixé à chaque instant, dans l'ignorance où nous sommes, comme sans doute eux-mêmes, de leur destination, leur vol, décidé par un instinct conforme à l'harmonie universelle, est une fatalité qui déroule l'ordre du temps. Que nous ne tentions plus de déchiffrer, que nous ayons abandonné l'absurde prétention, à partir de cette "révélation", de comprendre la totalité -prédire l'avenir comme il est possible légitimement à partir d'une loi connue- ne veut pas dire pour autant que ces événements sont devenus insignifiants, hasardeux, insensés. Si un hasard bienheureux vous met en situation d'être un jour dominé un instant par une colombe aux ailes déployées -intercesseur providentiel devant le soleil aveuglant- vous ne vous demanderez plus -comme moi- quelle inspiration suscitée par quelle intelligence dirigea la main du peintre qui, le premier, représenta ainsi le Saint-Esprit. Vous comprendrez sans le moindre doute que ce n'est pas autrement que devait être figurée la sublime et miraculeuse manifestation du Très-Haut.
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